vendredi 25 mars 2011

Vers des investissements qui marchent ?

À moins d'un revirement de situation extraordinaire, il y aura des élections fédérales au Canada au début du mois de mai, le budget présenté par Stephen Harper et ses disciples étant inacceptable aux yeux des partis d'opposition. De tout évidence, le gouvernement occupe un poste clé pour influencer la pratique d'activités physiques au niveau de la population. Comme je l'ai mentionné dans un message précédent, les plus récentes données de l'Enquête Canadienne sur les Mesures de Santé illustrent l'urgence d'agir à ce niveau. Mais par où commencer?

Il n'y a sans doute pas de recette miracle pour que la majorité de la population augmente radicalement son niveau d'activité physique. Par contre, les données scientifiques actuelles suggèrent que certaines stratégies sont plus efficaces que d'autres. Justement, l'International Society for Physical Activity and Health a récemment préparé un document-synthèse contenant 7 stratégies éprouvées pour augmenter la pratique d'activité physique. Ce document se veut en quelque sorte un complément de la Charte de Toronto sur l'activité physique (dont je suis l'un des signataires) qui a été adoptée à la 3è Conférence internationale sur l'activité physique et la santé publique en mai 2010.

Voici la liste des investissements en question:
  1. Mettre en place des programmes "École en santé"
  2. Développer des politiques et des systèmes de transport qui favorisent la marche, le vélo et le transport en commun
  3. Mettre en place des politiques d'urbanisme qui facilitent l'accès aux activités physiques récréatives et au transport actif pour l'ensemble de la population
  4. Intégrer la promotion de l'activité physique dans les soins de santé de première ligne dans le but de prévenir les maladies chroniques
  5. Implanter des campagnes d'éducation à la santé et de marketing social pour sensibiliser les gens à l'importance de l'activité physique et pour changer la norme sociale
  6. Développer des programmes communautaires qui ciblent plusieurs contextes et qui engagent une variété d'acteurs au sein des communautés
  7. Développer des systèmes sportifs plus inclusifs qui mettent l'emphase sur la participation tout au long de la vie (et non pas seulement sur la compétition)
Force est de constater que les investissements du gouvernement actuel - dont les principales priorités sont clairement le développement des sables bitumineux, la militarisation et l'augmentation des peines de prison - en ce qui a trait à l'activité physique ne concordent pas avec cette liste de priorités. Certains pourraient s'objecter en affirmant que les conservateurs ont mis en place un crédit d'impôts pour la condition physique. Or, d'après une étude de John Spence et ses collègues de l'Université de l'Alberta, cette mesure fiscale n'obtiens pas du tout les effets escomptés. Voici une brève description de cette étude qui, soit dit en passant, est accessible gratuitement dans la revue BMC Public Health :

Un échantillon représentatif de la population Canadienne comportant 1004 parents de jeunes de 2 à 18 ans ont accepté de répondre au questionnaire dont les questions ciblaient la pratique d'activités physiques organisées, les coûts associés à l'inscription de leurs(s) enfant(s) dans ces programmes ainsi que la connaissance et l'utilisation du programme de crédit d'impôt pour la condition physique. Les résultats indiquent que les participants ayant un revenu inférieur étaient nettement moins susceptibles de connaître l'existance de ce programme et de d'avoir réclamé le crédit dans leur rapport d'impôt.

Ainsi, ce programme profite davantage aux familles ayant déjà un revenu supérieur chez lesquelles le taux de participation sportive est nettement plus élevé. Donc, il s'agit, encore une fois, d'une baisse d'impôts qui favorise les plus riches. Il n'est d'ailleurs pas si étonnant que cette mesure soit contreproductive parce que les gens les plus démunis paient moins d'impôts. Si le gouvernement veut réellement stimuler la participation sportive, il faudrait diminuer directement les coûts qui y sont associés. Accorder des rabais substantiels aux plus démunis sur les frais d'inscription aurait un impact beaucoup plus tangible qu'un crédit d'impôts, d'autant plus que les rabais sont obtenus de façon immédiate alors qu'il faut attendre plusieurs mois pour obtenir le retour d'impôts.

Sur ce, j'espère que les partis politiques décideront de s'inspirer d'au moins une des stratégies éprouvées décrite dans le document produit par l'International Society for Physical Activity and Health. De mon côté, je vais essayer de connaître l'approche qu'ils préconisent (s'il y a lieu bien sur) pour favoriser le transport actif. Je vous en reparlerai dans un prochain billet.

Référence
Spence, J.C., Holt, N.L., Dutove, J.K., Carson, V. (2010). Uptake and effectiveness of the Children's Fitness Tax Credit in Canada: the rich get richer. BMC Public Health, 10, 356 http://www.biomedcentral.com/content/pdf/1471-2458-10-356.pdf

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