Jyväskylä
est une ville étudiante de taille semblable à Trois-Rivières et Sherbrooke
située au 62è parallèle, à environ 300 kilomètres au nord d’Helsinki. Le climat
me semblait comparable à celui du Saguenay, mais en ce début novembre, les
journées y étaient beaucoup plus courtes en raison de la latitude.
Les
lecteurs réguliers se rappelleront que l’an dernier, j’avais discuté des
infrastructures cyclables et piétonnières d’Helsinki et Vuokatti sur ce blogue.
À mon avis, le réseau cyclable de Jyväskylä est encore mieux organisé que celui
d’Helsinki. La différence réside dans l’intégration du réseau (les pistes
cyclables et pédestres sont particulièrement bien reliées entre elles) et dans
le souci d’aménager des tunnels et des ponts pour éviter le plus possible les
intersections avec les routes principales où la vitesse des voitures est plus
élevée. Le réseau est aussi très bien balisé pour qui sait lire le Finnois.
Ceci
rend le réseau sécuritaire et agréable, ce qui contribue probablement à faire
en sorte que la proportion de femmes parmi les cyclistes utilitaires (en
Amérique du Nord, près de 3 déplacements à vélo sur 4 sont effectués par les
hommes alors que c’est grosso modo 50-50 dans les pays Scandinaves et aux
Pays-Bas). Cette différence entre la proportion de déplacements à vélo
effectués par les femmes et les hommes serait principalement causée par une
plus grande aversion du risque chez la gent féminine (Garrard et al., 2008).
De
plus, ces aménagements font en sorte que les cyclistes ne se sentent pas comme des
citoyens de deuxième classe. À l’opposé, au Québec, comme dans le reste du Canada,
on dirait quasiment que la voirie s’amuse à mettre des panneaux d’arrêt partout
sur les pistes cyclables, même quand elles croisent un cul-de-sac avec une
circulation négligeable[i].
Ceci ralentit les déplacements des cyclistes, ce qui n’est pas une bonne idée
parce que l’un des principaux facteurs que les gens considèrent dans le choix d’un
mode de transport est nul autre que le temps. Qui plus est, une étude
Australienne a montré que les gens ont tendance à sous-estimer le temps
nécessaire pour les déplacements en voitures et à surestimer le temps requis
pour les déplacements avec d’autres modes de transport (Shannon et al., 2006).
Loin devant l’Amérique du Nord et la France…
La
part modale du vélo dans l’ensemble de la Finlande est de 11%, mais elle est apparemment
plus faible à Helsinki et plus élevée dans certaines villes de taille moyenne dont
notamment Oulu (que je n’ai pas encore visitée) et Jyväskylä où elle peut
atteindre 15-20% dans certaines périodes de l’année. À titre comparatif, les
données du recensement Canadien de 2006 indiquent une part modale du vélo de
1,3% au Canada (avec 1,4% au Québec). Quant à la France, la part modale y est
d’environ 3%, malgré un climat beaucoup plus favorable.
Même
en ce début novembre, avec une température à peine supérieure au point de
congélation et seulement 8 heures de clarté par jour – « grisaille »
serait peut-être plus juste puisque je n’ai pratiquement pas vu le soleil en 6
jours – les racks à vélo débordent. La photo en tête de ce billet est un échantillon des vélos
stationnés au pavillon des sports, où avait lieu le congrès, mais j’aurais pu
prendre un cliché semblable à bien d’autres endroits sur le campus de
l’Université de Jyväskylä et au centre-ville. Je dis
« échantillon » parce qu’il aurait fallu un grand angle sur ma caméra
pour les prendre tous…
On
m’a dit toutefois qu’il y a beaucoup moins de vélo en hiver quand il fait -20,
mais les cyclistes hivernaux ne sont pas perçus comme des hurluberlus comme
c’est parfois le cas au Québec et dans le reste du Canada. Les pistes cyclables
Finlandaises sont déneigées en hiver – pas aussi rapidement qu’à Copenhague,
mais elles le sont quand même, j’ai pu le constater lors de mon passage à
Vuokatti en avril dernier. Oui, il y avait encore de la neige en avril, suffisamment
pour faire du ski de fond. Il y aura d’ailleurs un congrès international sur le
vélo hivernal en février prochain à Oulu, je ne pourrai pas y être cependant.
De
plus, le réseau cyclable est éclairé le soir, comme vous pouvez le voir sur la
photo ci-dessous. Il s’agit d’un pont réservé aux piétons, cyclistes, coureurs
et patineurs qui permet de traverser le lac Jyväsjarvi. Le pavillon des
sciences et génie est l’édifice que vous voyez de l’autre côté du lac. Il y a
justement une belle piste cyclable qui fait le tour du lac sur environ 14 km avec
de l’asphalte lisse et qui est assez large pour permettre une
« cohabitation » harmonieuse des différents types d’utilisateurs. Faute
de vélo, je l’ai parcourue à la marche et à la course. L’autre cliché est la
vue du pont depuis ma chambre d’hôtel ; j’étais stratégiquement positionné pour
observer que la piste cyclable est achalandée, même le soir.
Références
Garrard, J., Rose, G., Lo, S.J. (2008).
Promoting transportation cycling for women: the role of
bicycle
infrastructure. Preventive Medicine, Vol.46, No.1
(January 2008), pp.55-59.
Shannon, T., Giles-Corti, B., Pikora, T.,
Bulsara, M., Shilton, T., & Bull, F. (2006). Active
commuting in a university setting:
assessing commuting habits and potential for
modal change. Transport
Policy, Vol.13, No.3 (May 2006), pp. 240-253.
[i] Si
vous croyez que j’exagère, allez faire la piste cyclable entre les secteurs Hull
et Aylmer de la ville de Gatineau. Vous m’en donnerez des nouvelles…
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