mercredi 2 novembre 2011

Diminution des facteurs de risque de maladies cardiovasculaires associée au vélo chez les jeunes

J’ai déjà discuté sur ce blogue des impacts positifs du transport actif sur les facteurs de risques de maladies cardiovasculaire chez les adultes (i.e. Oja et al., 1991, 2011). Jusqu’à maintenant aucune étude n’avait examiné si de tels bienfaits peuvent également être présents chez les plus jeunes. Un nouvel article paru dans la revue Journal of Physical Activity and Health vient remédier à cette situation (Andersen et al., 2011).

Les chercheurs ont analysé des données provenant de la branche Danoise de l’European Youth Heart Study, une étude portant sur la santé cardiovasculaire des jeunes dans différents pays Européens. La portion Danoise est la seule qui comportait un volet longitudinal dans lequel une des cohortes de participants a été suivie pendant 6 ans (soit de 9 à 15 ans).

Les participants ont rempli un questionnaire dans lequel ils devaient entre autres indiquer leur mode de transport scolaire et le temps nécessaire pour faire la navette entre l’école et la maison. Ils ont porté un accéléromètre Actigraph pendant 4 jours consécutifs pour mesurer la pratique d’activités physiques. Leur capacité cardiovasculaire a été mesurée avec un test sur vélo stationnaire. Des mesures du poids, de la taille, du tour de taille, des plis adipeux, du taux de cholestérol et de triglycérides sanguins[i], de la pression artérielle, de la glycémie, de l’insulinémie et de la tolérance au glucose[ii] ont aussi été effectuées.

Les résultats indiquent que, peu importe l’âge, les cyclistes avaient une capacité cardiovasculaire nettement supérieure. La différence moyenne observée était de 9%. Toutefois, durant le reste de la journée, les cyclistes ne faisaient pas plus d’activités physiques que les non-cyclistes.

Les jeunes qui ont commencé à aller à l’école en vélo durant la période de suivi étaient aussi en meilleure condition physique que ceux qui faisaient du transport passif. De plus, ils avaient des résultats plus favorables au niveau du tour de taille, de la glycémie, de l’insulinémie, de la tolérance au glucose, du ratio entre le cholestérol HDL[iii] et le cholestérol total et du score global de risque cardiovasculaire.

À l’opposé, les jeunes qui ont cessé d’aller à l’école à vélo pendant l’étude  avaient un taux de triglycérides sanguins plus élevé que ceux qui ont continué à utiliser le vélo. Il est à noter que très peu de participants ont cessé d’utiliser le vélo – la part modale du vélo a augmenté de 43 à 66% pendant la période de suivi (ce qui est normal… au Danemark !) Dans ce contexte,  les chercheurs n’ont pas observé d’autres différences significatives, même si leurs valeurs pour plusieurs autres facteurs de risque étaient moins favorables que ceux qui avaient continué à utiliser le vélo.

Puisque les analyses préliminaires n’avaient montré aucune différence entre les marcheurs et les jeunes utilisant des modes de transport motorisés en ce qui a trait aux facteurs de risque cardiovasculaire, les analyses principales ont été faites en comparant les cyclistes aux non-cyclistes. Par contre, les auteurs ont eux-mêmes noté que cette absence de différences entre la marche et le transport passif pourrait être attribuable au faible nombre de marcheurs dans leur étude. Ainsi, il aurait fallu d’énormes différences pour que les chercheurs puissent être en mesure d’affirmer qu’il s’agit de différences statistiquement significatives – c’est donc d’une limite de l’étude.

Il est aussi possible que l’intensité plus faible de la marche utilitaire fasse en sorte qu’elle n’entraîne pas autant de bienfaits que le vélo chez les jeunes qui possèdent généralement une capacité cardiovasculaire plus élevé que les adultes au mitan de la vie (Shephard, 2008).

Par contre, il n’en demeure pas moins que chez les cyclistes, le même patron de bienfaits a été observé chez les filles et les garçons, ce qui donne de la crédibilité à ces résultats. D’ailleurs, si les différences pour chacun des facteurs de risque pris isolément étaient relativement faibles, le score global de risque cardiovasculaire (calculé en additionnant chacun des facteurs) indique que les cyclistes étaient nettement moins à risque de développer une maladie cardiaque. Ces résultats sont cohérents avec ceux qui ont été observés chez les adultes.

Dans un article paru dans la revue Lancet, ces chercheurs avaient observé un effet dose-réponse entre la pratique d’activités physiques et le risque cardiovasculaire au sein de la même population (Andersen et al., 2006). En d’autres mots, même chez les jeunes, on observe une diminution constante du risque cardiovasculaire à mesure que la pratique d'activités physiques augmente. Cela dit, ces nouvelles analyses illustrent que les bienfaits du vélo ne sont pas attribuables à un niveau d’activités physiques plus élevé durant le reste de la journée chez les jeunes qui se rendent à l’école en vélo.


Références

Andersen L. B., Harro, M., Sardinha, L. B., Froberg, K., Ekelund, U., Brage, S., & Anderssen, S. A. (2006). Physical activity and clustered cardiovascular risk in children: a cross-sectional study (The European Youth Heart Study). Lancet, 368, 299-304.

Andersen LB, Wedderkopp N, Kristensen P, Moller NC, Froberg K, Cooper AR (2011). Cycling to school and cardiovascular risk factors: A longitudinal study. Journal of Physical Activity and Health, 8, 1025-1033.

Oja P, Mänttäri A, Heinonen, A, Kukkonen-Harjula, K., Laukanen R, Pasanen M, Vuori I. Physiological effects of walking and cycling to work. Scandinavian Journal of Medicine & Science in Sports. 1991;1:151-157

Shephard, R. J. (2008). Is active commuting the answer to population health? Sports Medicine, 38 (9): 751-758.


[i] Les triglycérides sanguins sont des gras qui circulent dans le sang.
[ii] L’intolérance au glucose est un signe précurseur du diabète de type 2.
[iii] C’est-à-dire le “bon cholestérol”.

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