vendredi 20 mai 2011

Le transport actif, quossa donne?

          Voici le premier d’une série de billets dans lesquels j’examinerai les effets du transport actif sur la santé. Comme le dit le dicton, à tout seigneur, tout honneur… Je vais donc discuter de la première étude scientifique sur le sujet qui a été publiée en 1991 dans la revue Scandinavian Journal of Medicine & Science in Sports (Oja et al., 1991).

Dans cette étude, 68 adultes finlandais auparavant sédentaires (38 hommes et 30 femmes) âgés d’environ 40 ans ont été répartis aléatoirement dans deux groupes. Les participants du groupe expérimental ont accepté d’aller travailler à pieds ou à vélo pendant 10 semaines consécutives. Le mode de transport actif (marche ou vélo) était assigné en fonction de la distance entre la maison et le travail. Pour leur part, les participants du groupe témoin devaient se rendre au travail en autobus ou en voiture.

Durant les 10 semaines, les participants du groupe expérimental ont fait du transport actif durant 78% des journées de travail tandis que ceux du groupe témoin se sont déplacés de façon motorisée 92% du temps. La fréquence cardiaque moyenne était de 121 et 133 battements par minutes pour la marche et le vélo respectivement. La fréquence cardiaque moyenne a diminué quelque peu vers la fin de l’étude. Cependant, la vitesse avait augmentée autant pour les marcheurs (de 5,8 à 6,2 km/h) que pour les cyclistes (de 17,6 à 20 km/h).

Le programme de 10 semaines a entraîné une augmentation de 4,5% de la capacité cardiovasculaire et une augmentation de près de 10% du temps à l’épuisement[i]. À une intensité correspondant à 85% de la capacité cardiovasculaire du début de l’étude, des diminutions de la fréquence cardiaque, de la lactatémie[ii] et de la ventilation ont été observées. Ceci témoigne également d’une amélioration de la condition physique.

Une augmentation de 5% du cholestérol HDL (le « bon cholestérol ») a aussi été notée, sans changement au niveau des autres formes de cholestérol. Aucun changement n’a été observé au niveau de l’indice de masse corporelle. Cela dit, plusieurs programmes d’exercice ont entraîné une diminution de la masse adipeuse sans changement du poids corporel (Chaput et al., sous presse).

À la fin des 10 semaines, les participants du groupe témoin ont été assignés, eux aussi, à la marche ou au vélo pour 10 autres semaines afin de comparer l’impact des deux modes de transport actif. L’amélioration de la capacité cardiovasculaire a été plus importante chez les cyclistes, soit 7% comparativement à 2%. Cette différence peut s’expliquer par une intensité moyenne d’exercice supérieure (65% vs. 53% de la capacité cardiovasculaire).

Bien que des programmes d’entraînement structurés puissent entraîner – à court terme – des gains plus importants au niveau de la capacité cardiovasculaire, il n’est pas acquis que ces bienfaits puissent être maintenus à long terme (à part chez ceux qui sont très assidus à l’entraînement).

Justement, dans une étude États-Unienne parue dans le Journal of the American Medical Association, des adultes sédentaires avaient été assignés aléatoirement à deux groupes (entraînement structuré vs. activités physiques intégrées au mode de vie) (Dunn et al., 1999). Après 6 mois d’entraînement dans un centre de conditionnement physique réputé internationalement (le Cooper Institute), les participants du premier groupe avaient effectivement obtenu une plus grande amélioration de leur capacité cardiovasculaire. Or, après 24 mois, il n’y avait plus de différences entre les deux groupes (l’étude s’est malheureusement terminée à 24 mois…).


Références

Chaput JP, Klingenberg L, Rosenkilde M, Gilbert J-A, Tremblay A, Sjödin A. Physical activity plays an important role in body weight regulation. J Obesity. In Press.

Dunn AL, Marcus BH, Kampert JB, Garcia ME, Kohl III HW, Blair SN. Comparison of lifestyle and structured interventions to increase physical activity and cardiovascular fitness. JAMA. 1999;281:327-334.

Oja P, Mänttäri A, Heinonen, A, Kukkonen-Harjula, K., Laukanen R, Pasanen M, Vuori I. Physiological effects of walking and cycling to work. Scand J Med Sci Sports. 1991;1:151-157.


[i] Les participants devaient compléter un test maximal de la capacité cardiovasculaire sur tapis roulant (pour les marcheurs) ou sur vélo stationnaire (pour les cyclistes). Dans ce test, les chercheurs augmentent progressivement l’intensité jusqu’à ce que les participants ne puissent plus continuer.
[ii] La lactatémie correspond au taux de lactate dans le sang (et non du fameux “acide lactique” – le lactate dont la formule chimique est C3H6O3 n’est pas un acide mais plutôt un sucre, soit la moitié d’une molécule de glucose (C6H12O6). Bien que la production de lactate augmente avec l’intensité de l’exercice, le lactate n’est pas une cause de la fatigue.

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