Et
oui, vous avez bien lu. Malgré l’opposition de la ville de Montréal, des chefs
de l’opposition et de Vélo Québec, le gouvernement libéral de Jean Charest
exige que BIXI vende ses activités internationales pour rembourser sa dette.
Pourtant, les activités internationales sont celles qui sont les plus
profitables à l’heure actuelle... Il y aurait apparemment trois acheteurs
potentiels, dont deux sont Québécois et un Britannique. Cependant, ce
dernier semble avoir une longueur d’avance.
À
mon avis, le gouvernement fait une grave erreur en agissant de la sorte et ce
pour plusieurs raisons. D’abord, une raison évidente : advenant le cas où l’entreprise
britannique mettrait la main sur BIXI pour une bouchée de pain, une trentaine
d’emplois seraient perdus aux ateliers du fabricant Devinci au Saguenay. Cette
région est déjà grandement affectée par les fermetures d’usines. Ce
gouvernement qui se permet de négocier des ententes secrètes pour
approvisionner les alumineries en électricité, pourrait bien donner une chance
aux employé(e)s de Devinci.
Les
vélos BIXI, développés par des Québécois, ont été adoptés par plusieurs autres
villes dont Ottawa, Toronto, Boston, Londres, Melbourne et Washington pour n’en
nommer que quelques-unes. Il est fort probable que d’autres villes décident d’adopter
ce système, et si tel était le cas, il en résulterait des revenus qui
pourraient être utilisés pour rembourser cette fameuse dette.
Bienfaits des vélos en libre-service
D’ailleurs,
les lecteurs réguliers se rappelleront que j’ai déjà discuté d’une étude
portant sur les bienfaits de l’équivalent Espagnol du Bixi, les vélos Bicing de Barcelone. Entre autres, cette étude, parue dans le British
Medical Journal, a évalué que l’utilisation des Bicing permet
de réduire les émissions de CO2 de 9 062 344 kg par année à
Barcelone (Rojas-Rueda et al., 2011).
Considérant
que la population de Montréal et la part modale du vélo utilitaire est
similaire à celles de Barcelone, l’extrapolation des données de Rojas-Rueda et
ses collègues peut donner une estimation de la réduction des émissions de CO2
que l’on pourrait attribuer aux BIXIs Montréalais.
Bien
entendu, la marge d’erreur peut être considérable et l’incorporation d’autres
facteurs permettrait d’améliorer la précision des estimés. Cependant, cette extrapolation
peut nous donner une idée des économies financières que les BIXIs pourraient engendrer
sur un éventuel marché du carbone. Je tiens à préciser que le gouvernement
libéral s’est lui-même engagé à instaurer un marché du carbone dès l’an
prochain.
Bon,
revenons à nos moutons ! Admettons que le prix attribué à l’émission d’une tonne
de CO2 serait de 10$, les BIXI généreraient des économies d’environ
90 000$ par année ; s’il grimperait à 20$, les économies atteindraient 180 000$
par année, et ainsi de suite.
D’autre
part, l’augmentation de la pratique d’activités physiques associée au vélo
contribuerait à réduire les dépenses en soin de santé de façon encore plus
importante. L’activité physique permet
de réduire le risque de mortalité prématurée, de maladies cardiovasculaires, de
diabète, de certains cancers, de la dépression, etc. (Warburton et al., 2006). Brefs,
plusieurs problèmes de santé qui coûtent une fortune aux contribuables.
Mieux connaître les utilisateurs...
De
plus, si les administrateurs du système BIXI connaissaient mieux le profil des
utilisateurs, il serait possible d’apporter des améliorations au niveau de la
logistique (i.e. emplacements des stations, nombre de vélos par station, etc.)
et de la tarification. L’an dernier, des
chercheurs de l’Université de Montréal et de la direction de la santé publique
de Montréal ont publié une étude scientifique sur l’utilisation des BIXIs et
les caractéristiques des utilisateurs dans la revue American Journal of Preventive Medicine (Fuller et al., 2011). J’en
ai discuté dans un billet précédent.
En conclusion
Considérant
l’ensemble de ces facteurs, il me semble que la vente du système BIXI à des
intérêts étrangers serait une très mauvaise idée. Dans ce dossier – comme dans
plusieurs autres malheureusement – le gouvernement libéral ne semble considérer
que les impacts directs à court terme. Le prêt accordé par le gouvernement à la
ville de Montréal pour la gestion des BIXIs devrait être considéré comme un
investissement et, à moyen et à long terme, cet investissement pourrait être
très rentable… à condition que le gouvernement revienne sur sa décision avant
qu’il ne soit trop tard !
Références
Fuller D, Gauvin L, Kestens Y, Daniel M, Fournier M,
Morency P, Drouin L. Use of a new public bicycle share in Montréal, Canada. Am J Prev Med. 2011;41(1):80-83.
Rojas-Rueda,
D., de Nazelle, A., Tainio, M., Nieuwenhuijsen, M. (Sous presse). The health benefits and risks of cycling in urban
environments compared with car use: health impact assessment study. British Medical Journal
Warburton DER, Nicol CW, Bredin SSD. Health benefits
of physical activity: the evidence. Can
Med Assoc J. 2006;174:801-809.
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